Amanda Lear est de retour sur les planches parisiennes depuis début février et, de toute évidence, la Reine tour à tour de la Mode, du Disco et du Boulevard s’y trouve comme un poisson dans l’eau, elle qui s’accorde volontiers la noble mission de distraire le public en sachant le surprendre à la moindre réplique ou au détour de chacune de ses volte-face.
En choisissant avec le producteur Jean-Marc Dumontet de réaliser une nouvelle adaptation théâtrale du Film « L’Argent de la vieille » de Luigi Comencini, la comédienne, aujourd’hui si bien expérimentée, se fixait l’objectif d’emmener son équipe artistique dans une progression dramaturgique aussi intense que comique.
En s’offrant à nouveau une mise en scène de Raymond Acquaviva comme pour « Panique au Ministère » & « La Candidate » dont les auteurs Jean Franco et Guillaume Mélanie adapteraient, cette fois-ci, les dialogues cinématographiques de Rodolfo Sonego en 1972 au diapason de l’époque actuelle, la volonté de se placer à hauteur de l’attente des spectateurs serait donc entre de bonnes mains d’autant plus que Atmen Kelif & Marie Parouty endosseraient les rôles ambivalents du couple de « Pauvres » dont la comtesse allait pouvoir prendre un malin plaisir à faire perdre au jeu toutes leurs ardentes convoitises de richesse.
En outre, liée aux services paradoxaux de Georges (Olivier Pagès) l’étrange majordome à la fois subjugué par sa maîtresse bien que suspecté par celle-ci de nourrir un intérêt spéculatif sur son héritage et également servie par Anastasia, jeune domestique claudicante (Jeanne Perrin), la milliardaire aura l’audace de n’épargner aucune vexation humiliante à celle-ci de même qu’aucune réprimande méprisante à celui-là.
Ainsi les quatre faire-valoir de La Diva sont bel et bien au taquet pour déployer la folle énergie nécessaire à contrer les plans machiavéliques visant à satisfaire son bon plaisir de dilettante planétaire.
Force est d’ailleurs de constater qu’Amanda Lear n’a pas vraiment besoin d’en rajouter en démonstrations spectaculaires tant, autour d’elle, l’agitation est à son comble pour faire monter l’appât des gains escomptés comme ceux d’un enjeu existentiel à l’égard d’une telle micro-société métaphorique.
C’est, ainsi, un délice cruel que de voir apparaître à chaque étape du rapport de forces ponctuée par les musiques d’Abba (Money, money…), du Pink Floyd (Money) voire du générique de Dallas… la richissime voyageuse arborant des toilettes plus extravagantes les unes que les autres tout en venant se confronter aux délires exponentiels de ses souffre-douleurs, eux pourtant convaincus de parvenir à la « plumer jusqu’à l’os » alors que de multiples « quitte ou double » ne cesseront d’alimenter leur folle ambition de venir rivaliser avec la fortune colossale de La Vieille.
Cependant comme la « Belotte » ne serait point cette « machine à cash » systématique n’ayant que des probabilités financières vertueuses, la vieille américaine diabolique va aussi entreprendre, en marge de ces parties de cartes, de redoutables manœuvres de déstabilisation stratégique envers l'entité adverse de façon à diviser pour régner sur son monde d’obligés.
Ainsi en tentant de saper la confiance instinctive à l’intérieur du couple de miséreux (Pierrette & Jean-Luc) ainsi que celle de leur propre fille qui n’est autre que la fameuse domestique tout en fustigeant le moral laborieux du majordome, la comtesse pourrait avoir de très bonnes chances de faire tourner définitivement la victoire par un KO général en sa faveur.
Néanmoins, du côté d’Anastasia pourrait souffler la perspective de mettre fin à toute emprise maître-esclave puisque cette bonne à tout faire, ayant perçu la nature perverse du processus relationnel faussement ludique, serait parvenue à acquérir des armes personnelles pour s’extraire de ce « jeu ô combien vicié ».
Alors, bien sûr, tous les espoirs resteraient pareillement permis pour chacun des protagonistes dépités bien que cette adaptation théâtrale n’aurait d’autre prétention philosophique que « le pur divertissement » avec sa louable intention de rire et de s’esclaffer en bonne compagnie.
En l’occurrence Amanda Lear a effectivement tiré la meilleure carte, celle de pratiquer cyniquement la dérision libératrice en feignant par la méchanceté gratuite d’offusquer autrui et de narguer tout dessein éthique à grands frais… selon la manigance insidieuse du miroir auto-déformant.
L'ARGENT DE LA VIEILLE - ***. Theothea.com - de Rodolfo Sonego - adaptation Jean Franco & Mélanie Guillaume Mélanie - mise en scène Raymond Acquaviva - avec Amanda Lear, Atmen Kelif, Marie Parouty, Olivier Pagès & Jeanne Perrin - Théâtre Libre
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