"La Candidate" : Amanda Lear, suffragette du rire !
Le rideau se lève. Après quelques secondes de suspense, elle sort du cabinet de toilette dont la porte est restée grande ouverte. Tornade déboulant sur scène comme un chien dans un jeu de quilles, silhouette conquérante dans sa robe panthère, Amanda Lear, alias Cécile Bouquigny, rentre en scène en faisant exploser l’applaudimètre. Une entrée en scène à l’ancienne à l’instar des grandes stars du boulevard d'antan comme Jacqueline Maillan ou Maria Pacôme. Amanda Lear est donc de retour dans "La Candidate", la suite de "Panique au Ministère". Et, c’est fou ce qu’elle aimante les foules. Elle joue une ministre de la Jeunesse et des Sports, parachutée à ce poste grâce à un émir du Qatar. Sur un coup de tête, elle se présente à la présidentielle de 2017, balayant d’un revers de main toute primaire dans son parti et, du coup, semant à nouveau la panique au ministère
Une folle candidature qui est prétexte à une intrigue farfelue pour tenter d'amener au pouvoir cette candidate sans idées, ni programme. A partir de ce scénario improbable et hautement inflammable, le spectacle gambille sur une multitude de saynètes plus désopilantes les unes que les autres où l’on assiste à une course au pire à la mécanique implacable avec les embardées foldingues d’Amanda Lear. Tour à tour borderline, voluptueuse, persifleuse, cynique, elle est excellente en ministre à la faconde arsouille qui se joue de la bienséance et des convenances propres à sa fonction pour arriver à ses fins et se délectant de faire sauter un à un tous les maillons des usages protocolaires. Et, de s’en donner à cœur joie avec des dialogues trempés dans le curare, piquants et vifs, des répliques modernes, percutantes, cinglantes, vachardes, ciselées come une dague et alésées au micron et truffées de clins d'oeil et de références à l'actualité proche.
A ce niveau-là, c’est de la grosse artillerie. Fines bouches s’abstenir ! On ne boude pas notre plaisir à être au cœur brûlant de ces affaires politiques, à voir notre folle Amanda s’ébrouer sur scène, ne ressemblant à personne avec sa filouterie goguenarde, son corps nerveux de jeune fille, sa bouille espiègle et son irrésistible jeu scénique. Quel abattage au bazooka ! Elle envahit l'espace. Avec elle, un chat est appelé un chat et la patte n'est pas de velours ! De sa voix profonde, elle balance des énormités et piétine les conventions.
C’est du sur mesure, de la dentelle de Calais. Résultat : le public se convulse de plaisir. On y rit beaucoup, de grand cœur, d’éclats libérateurs avec un épatant chœur de comédiens tout en étincelles à commencer par l’irrésistible Raymond Acquaviva (aussi metteur en scène et drôle en première dame), Edouard Collin qui s'empare de la pièce avec talent et une interprétation juste et nerveuse ou encore les talentueuses Marie Parouty, Lydie Muller et Camille Hugues. Les rires montent ainsi vite en flèche pour ne plus retomber jusqu’à la fin de la pièce face à cette embardée de joyeux drilles. Tous tirent certes sur la grosse et fragile ficelle de leurs personnages avec une cavalcade d'effets parfois épais. Toutefois, on ne va pas reprocher à ce spectacle ses gros sabots car c'est le genre qui les réclame. Il y a de la farce mais aussi de la folie dans cette pièce, au bel élan collectif, jusqu'à des moments délirants, voire déraisonnables et démesurés, qui décuplent l'énergie des interprètes.
Bref, vous l’aurez compris, c’est gratiné, politiquement incorrect mais on en redemande...
THEATRE DE LA MICHODIERE - 4 bis Rue de la Michodière 75002 Paris
Du mercredi au samedi à 20h30. Matinée le samedi à 16h30 et le dimanche à 15h30.
Pour en savoir plus sur la pièce "La Candidate", visitez le
site officiel !
Dominique PARRAVANO